Le masculin sacré V – La Transmission

Depuis que j’ai commencé à écrire sur le masculin sacré, des interrogations reviennent régulièrement dans mon esprit : le pourquoi du comportement des hommes ? Comment se fait-il que de petits garçons adorables, deviennent des adultes parfois toxiques, déviants, et souvent coupés de leurs émotions ? Alors qu’au contraire, certains vont plutôt développer le côté « gentleman » ?

Des entretiens précédents et de ceux que j’ai mené plus récemment pour ce volet, il apparait que la place des parents dans la vie des hommes est cruciale, notamment la transmission au travers de l’éducation et de l’affection prodiguée de père à fils, et ce, depuis des générations.

Tout d’abord, il faut rappeler qu’il y a une césure entre la génération de nos parents et la nôtre (nous les 40-50 ans à ce jour). Nos pères et les pères actuels ont peu en commun quant à la vision de la famille et l’implication avec les enfants.

Il est à noter que cet état de fait coïncide avec la mixité des classes dans l’enseignement scolaire. Avant la loi Haby du 28 décembre 1976, les garçons et les filles allaient dans des écoles séparées et avaient également des cours différenciés, comme la couture ou la cuisine pour les filles par exemple.
Depuis la mixité à l’école, les enfants sont en contact les uns et les unes avec les autres, ce qui dès la base pose le principe d’égalité dans l’instruction, car les cours prodigués sont les mêmes pour les uns, les unes et les autres. Ce qui signifie aussi que les enfants grandissent avec l’idée que le genre ne fait pas la performance ou la qualité.

Il est donc fort à parier que ça a beaucoup joué dans la césure entre les pères « old school » et les pères d’aujourd’hui.

Par ailleurs, des entretiens que j’ai eu la chance d’avoir avec les rares hommes qui ont bien voulu me consacrer un peu de temps, il y a des facteurs communs :

– des pères distants, souvent colériques et très proches de leur grande amie, la bouteille d’alcool. Dans ces foyers, les mères souvent patientes et endurantes ont du porter le fardeau pour tout le monde. Les pères étant dans l’incapacité d’assumer leur part tant matériellement qu’émotionnellement. Leur « vie d’homme » se déroulant principalement à l’extérieur du foyer.

– les hommes avec qui j’ai pu parler ont tous développé le côté spirituel.

– leurs pères étaient, eux-mêmes en grande souffrance et avaient connu aussi des pères durs et distants.

Difficile dans ces conditions d’attendre de leur part des comportements affectueux et de la disponibilité. Encore une fois, il s’agit de généralités, car dans les faits, il pouvait y avoir tout de même quelques cas qui sortaient de cet ordinaire. Et d’ailleurs, pour l’un des hommes avec lesquels je me suis entretenue, cela s’est traduit par un grand sens de la bienveillance et de la protection. Son parcours personnel montre que malgré la « nécessaire » rébellion liée à l’adolescence, la transmission paternelle et même grand-paternelle a fait germer en lui l’envie d’aider les autres, le désir d’être un « père », un « frère » pour les hommes et les femmes de son entourage. Il est aujourd’hui un chef d’entreprise accompli et un Ovate (et responsable d’un collège druidique) épanoui. Car, dans son cas, toutes ces valeurs si elles se vivent au niveau personnel, elles se vivent aussi indissociablement de façon spirituelle. Le masculin sacré est intégré et fait le terreau de tout ce qu’il cultive en lui et autour de lui.

D’autres hommes qui n’ont pas eu cette chance, ont eu des relations difficiles et conflictuelles avec leurs pères. Même si, au fond, il y a l’intuition que ces pères aimaient quand même leurs enfants, et particulièrement leurs garçons, ils semblaient très mal à l’aise avec l’image miroir que ceux-ci leur renvoyaient d’eux-mêmes. Et du fait qu’ils étaient bien mal aimés de leurs pères, ils aimaient donc mal leurs fils. Mais, quand il y a une génération d’écart, cela se passe mieux. Le grand-père va montrer plus d’affection vis-à-vis de ses petits-enfants. Celle-là même qu’il n’a pas réussi à donner à ses propres enfants. L’âge, les conditions de vie et la part de responsabilité, bien moindre dans le cas des grands-parents, rendent les relations plus détendues, sûrement.

Pour autant, ces rapports difficiles père-fils, ont pu permettre aussi la survenue d’électrochocs, qui ont réveillé la quête de sens chez certains de ces hommes. Ils ont vu dans ces rapports la nécessité de s’éveiller et de participer à la guérison de la lignée familiale. La spiritualité s’est développé en même temps que ce désir de guérison de lignées (et de soi par la même occasion), et constitue également la base et les outils pour mener à bien cette guérison. Si la figure masculine dans le monde humain est défaillante, qu’à cela ne tienne ! On trouve les figures masculines dans les représentations des dieux anciens et de leurs qualités. On identifie ses lignées familiales aux anciens peuples et on tire les ficelles pour dénouer les liens, désenchevêtrer les vieux ossements présents dans les mémoires et qui alourdissent l’héritage. Nettoyer et purifier régulièrement ses espaces physiques et mentaux. Faire la place au nouvel homme et à sa descendance. Apprendre pour transmettre les valeurs qui permettent de prendre une place, au moins valorisante pour soi.

De plus, certaines pratiques anciennes (qui ont encore lieu chez les peuples proches de la nature) reviennent doucement sur le devant de la scène : les rites de passage. Cela mériterait d’y consacrer tout un article, car c’est aussi important pour le masculin que pour le féminin. Mais pour le moment, nous allons rester concentré sur le masculin sacré et en dire quelques mots, l’essentiel :
Les rites de transmission, ou de passage, marquent une rupture avec le monde de l’enfance et préparent à la vie d’adulte. Ils permettent de matérialiser ce passage et de débuter le cheminement vers l’homme en devenir (responsabilité, apprentissage d’un métier, développement de valeurs, etc).

Mais si la lignée paternelle défaille, parfois, cela peut aussi être la lignée maternelle qui empêche l’homme en devenir de s’épanouir. Un homme avec qui je me suis entretenue, a été plutôt marqué par le comportement de sa mère. Peu affectueuse, il a du bâtir une carapace et se couper de ses émotions pour pouvoir se construire. Suite à des événements familiaux, il a croisé le chemin d’une forme de spiritualité il y a tout juste 1 an. Cela a bouleversé sa vision des choses et ses rapports avec son entourage, y compris ses enfants.
La place de la mère est aussi à questionner, à repenser auprès de ses fils.

Au final, les hommes actuels, se trouvent à avoir la lourde tâche de se guérir, de guérir leurs lignées, et de transmuter le masculin guerrier en masculin « chamane ». Il est temps de déposer les armes et de replanter les racines dans un monde plus pacifique, non pas pour affaiblir le masculin, comme certains rétrogrades des médias le font croire, mais bien au contraire, pour rendre la puissance masculine aux hommes, en la débarrassant de la toxicité due aux comportements guerriers et de prédation. La puissance masculine, dans sa grandeur, canalise, construit et élève. Alors soyons vigilants à ce que nous apprenons à nos enfants, aux jouets que nous leur mettons dans les mains, et aux histoires, contes et légendes que nous leur racontons.

Auteur : Solrika

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