Spiritualités et territoires VII – Porter la lumière

 

 

Comme on dit : le meilleur pour la fin ! Mais est-ce vraiment une fin ou le début de quelque chose de bien plus grand ? Shaël est le créateur de ce blog, je le connais virtuellement depuis quelques années maintenant, comme je l’avais écrit dans l’interview consacrée à Alcofrybas Beltaine, nous nous sommes « rencontrés » sur le forum de la Ligue Wiccane Éclectique. Je l’ai toujours connu luciférien, alors que moi, j’ai emprunté divers chemins et je sens que je n’en ai pas encore fini…
Mais place pour le moment au porteur de lumière, Lucifer, qui, bien loin de l’image diabolique qu’on lui colle, serait, en fait, une des entités les plus lumineuses qu’il soit.

Solrika : Quelle est la genèse du Luciférisme ?

Shaël : Tu fais bien de parler de genèse, car en effet, c’est là que tout prend racine. Sais-tu pourquoi Dieu a provoqué le déluge selon la mythologie hébraïque ?

S : Non… Il était sûrement fâché, comme d’habitude.

Sh : Eh bien, il y avait des dissensions chez les créatures angéliques. D’un côté, il y avait les fidèles (à Dieu) et de l’autre côté, les rebelles. Les fidèles, les anges qui ont prit le parti de Dieu, s’en fichaient des humains. Mais les rebelles, eux les aimaient. Ils les aimaient tellement qu’ils se sont mélangés à certains humains, ce qui a donné la race des Nephilim*, ou géants. Ces êtres avaient donc des pouvoirs divins dans des corps humains. Cette race est apparue avant le déluge, et elle était considérée comme une abomination par Dieu et ses fidèles. Le déluge a donc été provoqué pour les éliminer, pratiquer un génocide en somme. Mais suite à cela, Dieu s’en est voulu, et s’est engagé à ne plus recommencer. Les survivants du déluge étaient donc Noé et ses enfants. Il y a eu une deuxième génération de Nephilim grâce à cela. Les rebelles se sont à nouveau mélangés avec les humains. Dieu n’a pas voulu les tuer, mais en même temps, il n’a pas non plus réussi à contrôler 3 anges qui étaient en conflit, à savoir : Samaël d’un côté (le préféré de Dieu et Chef des légions angéliques) et Michaël et Uriel de l’autre côté. Ces deux derniers anges étaient jaloux de Samaël et de son influence. La bataille a fait rage entre les fidèles et les rebelles. Les rebelles ont perdu et beaucoup d’anges ont été déchus. C’est à partir de ce moment-là, que Samaël est devenu Lucifer (le porteur de lumière et l’étoile du matin). La question que je pose est la suivante : « comment on peut considérer comme maléfique une entité qui porte ces dénominations ? » D’ailleurs dans le christianisme, Jésus était lui-même appelé Lucifer. Mais le concile de Nicée** (325 de notre ère) est passé par là… Et à partir de ce moment-là, il n’était plus appelé comme tel.

S : Mais en fait, Lucifer fait concurrence à Dieu et on ne peut pas avoir deux entités pour contrôler l’humanité.

Sh : Lucifer n’a pas voulu contrôler l’humanité. Lui, c’est l’Adversaire (avec un grand A). Il ne cherche pas à être vénéré.

S : Comment le Luciférisme a été traduit dans les pratiques cultuelles ?

Sh : Ça ne l’a pas été. Cette voie, qui n’est pas une religion, est à part, car elle n’a ni tuteur, ni dieu. C’est un courant philosophique. Pour les lucifériens, ce n’est pas un dieu à qui on voue un culte.

S : Mais comment le Luciférisme a été révélé ?

Sh : On ne le sait pas exactement. Au courant du XIXème siècle, il y a eu pas mal de choses qui ont bougé dans l’ésotérisme. Mais ça reste une voie très minoritaire, on a très peu d’infos.

S : Du coup, quelle est la différence entre Satanisme et Luciférisme ?

Sh : Le Luciférisme n’a rien à voir avec le Satanisme. Ce dernier a un symbole qui est le pentagramme inversé, qui représente l’esprit soumis à la matière. Cela signifie que l’Akasha*** est en-dessous de la matière. Ils sont soumis à une entité, Satan, qui est un adversaire divin. Les satanistes passent des pactes avec Satan pour obtenir ce qu’ils désirent.
Avec le Luciférisme, on est plutôt dans l’élévation de l’esprit humain. Le principe est que chacun.e est libre de ses actes, TANT QU’IL (ou elle) EN ASSUME LA RESPONSABILITÉ. Je peux faire ce que je veux tant que j’en assume la responsabilité.

S : Est-ce que tu penses que les humains sont vraiment prêts à ça ?

Sh : La plupart, non. C’est pour ça que le Luciférisme n’est pas prosélyte. A titre personnel, je ne cherche à convertir personne. Je réponds aux questions, si on m’en pose. Et cette interview me permet de clarifier les choses. Clairement, la plupart des humains ne sont pas en capacité de prendre en charge la responsabilité que suppose la liberté totale. Le libre-arbitre est maître, en quelque sorte, mais il faut pouvoir assumer.

S : On sort des lois sociétales alors ?

Sh : Dans l’absolu oui. Mais dans la pratique, les lucifériens sont plutôt dans la bienveillance. Si on prend tout de même un exemple extrême (et pas du tout représentatif du milieu), on pourrait dire que si un.e luciférien.ne se venge en tuant une personne qui lui a fait du mal, il/elle assume de passer sa vie en prison. C’est toute la beauté de la chose au final. Avoir conscience de la portée du libre-arbitre, c’est apprendre à ne pas l’utiliser tout le temps et pour n’importe quoi. C’est savoir le faire avec parcimonie et faire preuve de discernement. Pour être un bon luciférien, il faut être bien dans sa tête, et être bien dans sa vie. Dans le Luciférisme, tu es tout.e seul.e avec ton libre-arbitre et tes choix. Pour ceux qui auraient lu Kant, c’est quelque chose qui est mis en avant dans la morale kantienne : le libre-arbitre comme capacité à faire le bon choix moral.

S : Tu te considères quand même comme païen ?

Sh : J’ai du mal à mettre une étiquette sur ça. Ça ne m’empêche pas de célébrer certaines fêtes. Tu sais que les étiquettes et moi, ça fait beaucoup. Je vais te re-citer la phrase de Michel Foucault, dans son livre « l’Archéologie du savoir » : « Plus d’un, comme moi sans doute, écrit pour n’avoir plus de visage. […] Ne me demandez pas qui je suis et ne me dites pas de rester le même : c’est une morale d’état civil ; elle régit nos papiers. Qu’elle nous laisse libres quand il s’agit d’écrire. » On est changeant constamment, dans la vie, dans ses écrits… J’ai parcouru beaucoup de voies avant d’entrer dans le Luciférisme. J’ai été longtemps païen et je garde une affection toute personnelle pour Litha, Samhain et Yule. Au même tire d’ailleurs que certains athées fêtent Noël, la fête pagano-chrétienne.

S : Merci Shaël pour ton temps.

Sh : Merci à toi.

Je vais radoter… Mais je le dis encore une fois, que toutes ces interviews ont été à chaque fois un voyage dans l’univers des personnes qui ont accepté de parler de leurs vies et de leur chemin spirituel. Et j’en profite à nouveau pour remercier Shaël de m’offrir cet espace d’expression et remercier toutes ces personnes pour leur confiance.

Tout chemin mène à la source. Tout chemin croise d’autres chemins qui mènent à la source. Tout chemin peut s’emprunter, se traverser, se rebrousser… Car au final, la source est toujours là, sous nos yeux. Le temps nous y mène, en fait, la maturité plus exactement. Car la source est en nous. Never forget !

* (singulier : Nephel – note de l’auteure)
** plus d’infos : https://fr.wikipedia.org/wiki/Premier_concile_de_Nic%C3%A9e
*** Akasha, mot qui vient du sanskrit et signifie « éther » ou espace.

Propos recueillis par : Solrika

Illustrations : Doomer MacGregor et Shaël Eveningstar

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